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REGISTRES D
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combien qu'elle fust en aage médiocre et de virilité pour ce faire; qu'elle a passé Arthemise en pieté envers sondict seigneur et mary, comme assez le de-monstre l'entreprise indicible et admirable qu'elle a faict commencer à Sainct Denis en France f1', pour honorer sa sepulture, ouvrage que l'on peult dire l'ung des pl us grands, merveilleux et admirables du monde; quelle a aussy surpassé Camille en toutes affaires d'importance, speciallement au faict de ia guerre où elle a, d'une grandeur héroïque et courage invincible, tousjours accompaigné le Roy et Messieurs ses Freres, ayant oultre le plus souvent elle seule faict plusieurs grauds, fâcheux el périlleux voyages, pour la conservation de cest estat, mesmes au temps d'hyver et des grandes gelées et glaces, ne trouvant rien difficile pour l'amour naturel qu'elle a porté et porte à nosdictz seigneurs ses Enfans, pour la manutention de ceste couronnéde France; et pour tant l'on auroit dict d'elle ce que dict Virgile au second livre de son ./Enéide :
.....ducente deo, flammam interet hostes
Expedior'2'.
Et plus bas estoit ung tableau dedans lequel estoit escript en lettres d'or sur fond d'azur :
De MAINTENIR UNG ESTAT FLORISSANT
En SON ENTIER N'EST CHOSE TROP COMMUNE,
Mais le sauver, quant il va périssant,
Il N'EST DONNÉ EN CE MONDE Qu'A UNE. [ D. F.] '"'
Et près desdictes Lucrèce, Camille, Arthemise et Clœlie, estoient quatre aultres tableaux de pareille grandeur et façon, dedans lesquelz, ascavoir celuy qui estoit sous Arthemise, estoit escript :
ARTHEMISIA
non. apud antiquas viduas fuit altera major cosjugis in cineres pietas atque ossa sepulti Quam mea, testatuii quod kodile mausoleum.
Tu TAMEN E VIDUIS MB SOLA PIISSIMA VINCIS.
CAMILLA
al'sa ego sum virgo juvenum tenta.ie laborem, Scuta sudemque tenens; et martia bella frequentans, fortiter occubui. tua sed nunc gloria major, Qu.*; senior médias acies pro Rege subisti.
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et l'aureille la facile audience qu'elle a presté, sans jamais se Tascher d'importunité.
Sur l'autre terme, estoit une grande couppe et deux mains qui la tenoient, et au dessoubz deux cœurs attachez et liez ensemble d'un laqs d'amour, lequel se serroit au tour de la prinse de la couppe. Près desquelz deux cœurs, estoit ung luth, et encores au dessus de la couppe, une espée ayant le bout rompu, signif-fiant le soing et extreme diligence dont ceste dame a usé pour appaiser les troubles et guerres civiles de ce Roiaume. Car la couppe est le signe de confédération, les deux mains et les deux cœurs liez ensemble d'ung laqs d'amour contre la couppe, la réconciliation des deux partiz qui se sont conjoinctz amiablement ensemble, combien qu'ilz fussent auparavant très ennemis, par une bien heureuse paix et concorde tant recherchée par ladicte Royne, representée par le luth; lequel, combien qu'il soit composé de cordes differentes el divers tons, si est ce qu'estant poussé et manié d'une main industrieuse, rend de très bons et armonieux accordz, ainsi que, graces à Dieu, a bien sceu faire ceste Royne, laquelle a si bien et heureusement accordé les parties discordantes, qu'il en est sorty une très désirée paix, union et concorde. Et a osté le moyen de la guerre, signiffiée par la pointe de l'espée rompue. A la verité, qui considérera comme la dicte Dame s'est sagement conduicte en tant de grandes affaires, survenues durant la minorité du Roy et de noz seigneurs ses Enffans, et enfin avoir rendu les choses si paisibles et conservé ceste couronne, ne peult nyer qu'elle n'ayt esté, par don et specialle grace, guydée de l'esprit de Dieu, estant certain que la prudence et sagesse et tout le conseil humain n'eust peu suffire à conduire et conserver ung estat si battu et agité, comme nous avons veu cestuy cy depuis dix ans.
A ses piedz, estoient les ligures de Lucrèce, Arlhe-mise, Camille et Clœlie en leurs habitz royaulx, pour monstrer que ceste Dame a surpassé Lucrèce en chasteté, n'ayant voulu depuis le decedz du feu Roy Henry, son seigneur et mary, rentrer en nopces,
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(l> Le tombeau de Henri II, œuvre en grande partie de Germain Pilon. Sur les autres artistes qui travaillèrent à ce monument célèbre et sur la construction de l'église de Notre-Dame-la-Rotonde, entreprise par Catherine de Médicis pour servir d'abri au mausolée de son royal époux, voir l'intéressante notice de M. A de Boislisle, La sépulture des Valois à Saint-Denis. (Mémoires de la Société de l'Histoire de Paris et de l'Ile-de-France, t. III, 1877, p. 241-292.)
(2) Virgile, Enéide, liv. II, vers 632.
(3) Ces initiales ne sont pas expliquées par Simon Bouquet, mais elles doivent être mises pour Du Faur (Guy Du Faur, sr de Pibrac).
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